jeudi 15 avril 2010

Enquête à Vaucouleurs et Domremy, 1551

Enquête faite par le prévôt de Vaucouleur sur la famille de la Pucelle


L ‘an mil cinq cens cinquante-ung, apprez Pasque, le lundy treiziaisme jour du mois d’apvril, furent à nous, Jean Mougeot, prévost pour le Roy nostre Sire, en sa prévosté de Veaucouleurs, bailliage de Chaulmont-en-Bassigny, commissaire de Mrs des comptes à Paris, en ceste partye, par noble personne Lucas du Chemin, comparant en personne, sieur duFéron, soy disant procureur de Robert Le Fournier, baron de Tournebu, présentées les lettres patten tes du Roy nostre Sire en forme de chartes et confirmation de privilléges données à Rouen au mois d’octobre l’an de grâce mil cinq cens, seelléz du grand seel es lacz de soye de cire verde, ensemble les lettres de commission de messieurs des Comptes attachéz aud lettres de privillége et confirmation, desquelles lettres de commission s’ensuict la teneur. Les gens des Comptes du Roy nostre sire aux baillis d’Orléans, Bloys, Chaulmont en Bassigny et de Caen, ou leurs Lieutenants généraux et chacun d’eux en ses fins et mettes sur ce requis, salut : afin que puissent procéder comme de raison sur les lettres patentes délivrées en forme de Charte données à Rouen, au mois d’octobre MDV, auxquelz ces présentas sont attachées soubz l’un de noz signetz, obtenus et à nous présentées de la partye de Robert Le Fournier, baron de Tournebu et Lucas du Chemin, sieur du Féron ; nous vous mandons et commettons par ces présentes que appellez au devant vous les advocat, procureur et commissaire ordinaires dud. sieur esd. bailliage ou leur substitutz et commis en leur absence, chacun en ses fins et mettes, et aussy les esleus des élections esquels led. impétrant sont demourans, vous vous informez secrettement et bien, par gens non suspects ne favorables, et lettres authentiques, si aucunes vous sont produictes, si lesd. Le Fournier et Du Chemin sont yssuz et dessanduz de la lignée de la Pucelle Jehanne Day de Dom premy près Vaucouleur, desnommée esd. lettres et et leurs prédécesseurs ont esté tenuz et repputez en lieux où ils ont prins leur nativité et demourance et aussy comme telz ont jouy paisiblement sans contredit des privilléges et examptions octroyéez à lad. Pucelle et à ses parents, àplain spécifiéez ès lettres pattentes transcriptes esd. lettres, desquelles ferez faire lecture tant en vostre auditoire àheure et jour d’assises et jurisdiction ordinaire que, par-devant les esleuz de l’élection où sont demourans lesd. Le Fournier et du Chemin, esquelz ferez exposition du contenu espar quelz degrez et moiens, sy telz dites deux lettres pattentes aux dits habitants de la paroysse desdits impétrants, qui seront convocquez de votre ordonnance auxd. jour et heure, pour scavoir d’eulx s’ils scavent aucune chose pour contredire et empescher la vérification et enthérinement desd. lettres et s’ils se consentent à l’enthérinement d’iceulx, lesquelz si consentent et lesquelz non , informez vous semblablement de quelle vie renommée et conversation ont esté et sont lesd. Le Fournier, du Chemin et leurs prédécesseurs, et généralement vous informez et enquérez sur tout que vous et lesd. officiers verrez bon estre à informer et enquérir en ceste matière. Et laquelle information qui ainsi sera par vous faicte, ensemble votre procès-verbal de tout ce qui en aura esté par vous faict à l’exécution de ces présentes, ensemblement vostre advis et desd. officiers nous envoirez en forme deue signés de vous et d’iceux officiers, féalablement cloz et scellé à la fin comme dessus. Donné soubz nosd. signets ce vingtiesme jour d’octobre l’an M.VCL signé enfin Chevallier. Scellé de quatre signetz et marquez en cire rouge.

Nous requerrant, par luy du Chemin, es noms que dessus, suivant la teneure desd. lettres de commission, appelé avec nous, Guillaume de Ravière, procureur du Roy en lad. prévosté de Vaucouleur, en laquelle n’y a advocat du Roy, et de Jacques de Cléry, nostre greffier, voulloir enquérir et informer des faicts contenus esd. lettres de commission sur ce octroyées aud. du Chemin, esd. noms par Jean le Roy, sergent royal au bailliage dud. Chaulmont, li a faict donner assignation à huy, sept attendant huict heures du matin, par devant nous, aud. Vaucouleur, en l’hostel et taverne de honorable femme Magdalene Tremiet, veufve de feu Jehan Faulcon, en son vivant prévost dud. Vaucouleur, à plusieurs tesmoings pour dire et déposer vérité sur le contenu esd. lettres de commission, faicts et articles à nous baillés par escript de la part dud. du Chemin esd. noms ainsy que le tout nous est apparu par l’exploit dud. Le Roy, attaché à ces présentes, au moyen de quoi, en vertu desd. lettres de commission et suivant lad. assignation sont comparues àlad. heure et logis dessusd. honorables homme Didier Waultrain, marchand, vénérable et discrette personne messire Nicole Bouland prêtre, chanoine, François de Brixey, praticien, led. Jehan Le Roy, sergent royal, tous demeurant aud. Vaucouleur, Mathieu Gilles praticien, demeurant à Roye, Jacob Robert, laboureur, Blaize Bazrois, maçon, demeurant à Burey-en-Vaulx, Médard Ronier, marchand, demeurant à Challeines.

Desquels témoings à nous produits par led. du Chemin ez noms que dessus en présence dud. de Ravière, procureur du Roy et dud. de Cléry, greffier, avons receu le serment aux saincts esvangilles de Dieu, pour ce par eux touchés, de dire et déposer vérité, ce qu'ils ont juré et promis faire ; et leurs dictes dépositions fait mettre et rédiger par escript ainsy en la forme et manière qui en suit. Et premier :

Honorable homme Didier Waultrin, marchand, demeurant à Vaucouleur, aagé de soixante ans ou environ, comme il a dict, lequel apprez serment à lui faict aux Saints Esvangiles de Dieu de dire vérité et interrogé sur le contenu es dictes lettres de commission de nos sieurs des Comptes, circonstances et dépendances, et faicts produits et baillez par ledict Du Chemin, icy nommé, a dict et déposé qu’il est natif dudict Vaucouleur, distant du lieu de Dompremy-sur-Meuse de trois lieues et auquel Dompremy il a plusieurs et diverses fois fréquenté, au moyen de quoy dict avoir cognoissance des parents et lignaigers de Jehanne la Pucelle, mesme ung nommé Claude Day, autrement Daly au langage vulgaire du pays de par deçà, lequel puis xx ou xxx ans est allé de vie à trespas, lequel Day au moyen de la consanguinité de lignaige qu’il estoit à ladite Jehanne la Pucelle, vivoit noblement et tel estoit tenu et reputé sans estre contrainct à aucunes tailles et subsides, et ainsy qu’estoient exempts desdictes tailles et subsides tous les parents, fut en ligne masculine ou foeminine de ladicte Jehanne la Pucelle et lequel Claude Day estoit marié avec une nommée Nicolle Tiercelin, natifve de la cité de Treci, duquel mariage sont yssus et descendus Jehanne, Clère, Didon, Anne, Marguerite et Billon Daly, leurs enfants : avec lesquelles filles, en la maison dudict Daly leur père, a par plusieurs et diverses foys hanté et fréquenté, mesme du temps que ladicte Marguerite estoit fille à marier, vertueuse et honneste : et estoit le commun fame questoit une aultre Pucelle de leur race qui estoit revenue et que sy le Roy avoit affaire en son royaulme, encore n’estoit morte ne perdue la race de Jehanne la Pucelle ; car ladicte Marguerite la relleveroit et feroit fleurir lad. race et lignée. Et n’y avoit de toute la lignée de ladicte Jehanne la Pucelle, comme disoit l’on, aultre personne qui semblast mieux à ladicte Jehanne la Pucelle que ladicte Marguerite. A dit davantage avoir reteneu des anciens que ung des frères de ladicte Jehanne la Pucelle, du nom duquel n’est recordz, se retira à Orléans où il fut très-bien receu et acquist de grands biens et comme a entendu luy déposant, il fut depuis prévost dudict Orléans et que ses successeurs ou aulcun d’eux avoient estez alliez à la maison appelée de Villebresme près ledict Orléans, que l’on disoit estre gens nobles et de bonne apparence ; et que depuis quelque temps il a veu audict Vaucouleur ledict Du Chemin venir visiter la parenté de ladicte Jehanne la Pucelle, soy disant et reputant estre leur parent, venu et yssu de la source dudict frère de ladicte Jehanne la Pucelle, lequel s’en estoit allé audict Orléans, ainsy que ledict déposant a dict cy dessus. Et quant audict de Tournebus, n’en a aucune cognoissance, hors qu’il dict avoir oui dire à ses ancestres et aultres qu’il estoit parent et lignager de ladicte Jehanne la Pucelle, laquelle, comme il a aussy oui dire, avoit esté menée et conduicte au Roy nostre sire lors régnant, par le capitaine dudict Vaucouleur nommé Mre de Baudricourt. Et plus n’en a dit, sur le tout enquis.

Vénérable et discrète personne messire Nicole Boniland, prebtre et chanoine de l’église collegiale Nostre-Dame de Vaucouleur, aagé de LXIII ans ou environ, comme il a dit, apprez la main mise au port comme prebtre, et faict serment de dire vérité et interrogé sur ce que le tesmoing précédent a enté ouy et examiné, ja dict et déposé :

qu’il est natif dudict Vaucouleur, auquel lieu il a toujours faict sa continuelle résidence depuis le temps d’adollescence qu’il retourna des escolles de Paris, et par ce, avoir congneu, veu et frequenté ainsy plusieurs des parens et lignagers de feue Jehanne la Pucelle, natifve de Greux près de Domremy-sur-Meuse, ou dudict Domremy ne sçait bonnement, lequel est distant dudit Vaucouleur de trois petites lieues ; mesmes et antiennement avoir fréquenté en la maison de feu Claude Day autrement escrit au pays de par deçà, Daly, parent prochain, tel tenu et reputé, de ladite Jeanne la Pucelle, ne sçait en quel degré ni aussy en quelle ligne, masculine ou foeminine. Et lequel Claude Day, pour estre de la lignée de ladite Jehanne la Pucelle, estoit tenu pour noble, vivant noblement sçans estre contrainct aux tailles et redebvances qu’estoient contraincts et tenuz payer les roturiers. Duquel Claude Daly et sa femme seroient issuz et descenduz Jehennon, Clère, Margueritte et aultres enffans des noms desquelz n’est ledict déposant records, lesquelles ont estez depuis mariées à sçavoir : ladicte Jehennon à ung nommé Nicolas Robinet, demourant audict Vaucouleur, ladicte Claire audict lieu de Coussey lès ledict Dompremy et ladicte Margueritte au lieu de Horville à ung nommé Jehan Tiriot, demourant audict lieu. Laquelle Margueritte sentoit, par ses faicts et gestes, plus son homme de guerre que fille, portoit espée, le plus soupvent alloit à cheval et picquoit aussy hardiment que sy elle eust esté toutte sa vie duitte aux armes ; en façon telle que ceulx qui la voyoient ainsy et en tel esquipage et ne l’eussent congneue, eussent plustost pensé estre ung homme que une famme. Et ainsy que quelqu’unes fois ou lui parloit de ses gestes elle faisoit response (et luy a ouy faire ledict deposant), en telz motz : « Comme trouvez-vous estrange mes manières de faire ? Ne suis-je pas niesse et parente de Jehanne la Pucelle ? Je n’en feroy aultre chose. " Et sy a luy deposant tousjours ouy tenir et reputter par les anciens ladicte Marguerite et aultres enfants dudict Claude Day, avoir vescu noblement et tous aultres venus et yssus tant de ligne masculine que foeminine de ladicte Jehanne la Pucelle, laquelle Jehanne la Pucelle fut menée au Roy nostre sire et lors regnant par le capitaine de Vaucouleur, nommé Mons. de Baudricourt, ainsy que led. déposant a ouy dire et retenu de ses prédécesseurs. Et que depuis quelque temps, il a veu aud. Vaucouleur ledict Du Chemin visiter les parents de ladicte Jehanne la Pucelle, soy disant et reputant estre leur parent, venu et yssu de la source de l’un des frères de ladite Jehanne la Pucelle, lequel s’en estoit allé à Orléans ou en pays à l’environ, du temps que ladicte Jehanne la Pucelle estoit allée vers ledit sieur Roy et que ledit frère de ladicte Jehanne la Pucelle, duquel ledit deposant ne sçait le nom, fut depuis prévost dudict Orléans. Et ses successeurs avoient esté alliez en la maison, appellée audict pays, la maison de Villebresme. Et sy a dit que un nommé Thiebault le Noble, aultrement appelez Daussoys, demeurant à Sauvoy, près dudict Vaucouleur, pour ce estre dict et reputé parent de ladicte Jehanne la Pucelle, ne sçait du costé masculin ou foeminin, ne voullut jamais estre contribuable aux tailles et subsides, nonobstant quelques contrainctes sur ce à luy faictes, dont il avoit esté grandement agité, poursuivy en procez. Toutefois apprez plusieurs voyages par luy faicts au lieu de Paris, pour y resister auxdictes molestes où finablement avoit esté congneu qu’il estoit lignager de ladicte Jehanne la Pucelle, ne scait ledict déposant comme il a dict de quel costé, masculin ou foeminin, avoit esté renvoyé et tenu quitte et exempt de payer taille et subside comme noble, à cause des privilléges concédés à ladicte Jehanne la Pucelle ; et de faict a tousjours esté depuis ledict Thiebault tenu et reputté pour noble et appelé Thiebault le Noble, et usant dudict privillege de noblesse ; qui apprez son trespas a delaissé Jehan le Noble et Nicole le Noble, aultrement dict d’Aussoys, ses enfants, qui jouissoient, comme pense ledict deposant, dudict tiltre de noblesse, sçans estre contraincts auxdicts tailles et subcides. Et avoir luy deposant veu ledict Du Chemin, par cy devant, audict Vaucouleur, tenir et reputer ladicte Nicole, dicte d’Aussoys, pour sa parente venue et yssue de la lignée de ladicte Jehanne la Pucelle, et ladicte Nicole pareillement tenir et reputer ledict Du Chemin pour son parent et lignager à cause de ladicte Jehanne la Pucelle. Et quant audict de Tournebus, a dict n’avoir eu cognoissance de luy, mais a dict avoir assés de fois ouy dire à ses parantz antiens que ledict de Tournebus estoit aussy parant et lignager venu et yssu du costé et lignée de ladicte Jehanne la Pucelle. Et plus n’en a dict, sur le tout enquis.

Honorable homme François de Brissey, praticien, demourant audict Vaucouleur, aagé de LI ans ou environ, comme il a dict après serment par luy faict aux saints évangilles de Dieu, de dire vérité, interrogé sur ce que ce témoin précédent a esté ouy et examiné, a dict et déposez qu’il est natif de Brixey, distant dudict Vaucouleur de deux lieues et demye et de Dompremy, d’environ une demye lieue. Et que feu Jean de Brissey, son père, eust espousé en secondes nopces Sibille, fille de feu Claude Daly, peult avoir environ cinquante-trois ans, et que par plusieurs et diverses fois il y a ouy dire à Beatrix, sa mère-grand, mère audict de Brixey son père, qu’elle avoit veu ladicte Jehanne la Pucelle et que la veuve dud. Claude Daly estoit niepce de lad. Jehanne la Pucelle et que pareillement l’avoit ouy dire à ses parents et que d’iceluy Claude Daly et de Nicole fille de Jehan Tierselin estoient yssues huict filles, à scavoir :

Sibille, femme au père dudict déposant, Jennon, Didon, A nne, Catherine, Barbe, Clère, Marguerite. Et que depuis l’an mil. Ve et VII, ledict déposant a toujours hanté et fréquenté en l’hostel dudict Claude Daly, à cause que ledict Jean de Brixey, son père, avoit espousé ladicte Sibille, fille dudict Daly. Et jusques au jour de son trespas, qui fut trente ans ou environ, il l’a veu jouir et uzer du privillege de noblesse sans payer aulcun impots ou subsides àcause du droit accordé à lad. Jehanne la Pucelle de la lignée de laquelle estoit yssue et descendue lad. Sibille sa belle-mère et que depuis son deceds, ladicte Nicole demourée veuve dudict Daly a aussy tousjours jouy et uzé desdicts droits et privilleges de noblesse pour les causes que dessus. Dict aussy sçavoir qu’au lieu et village de Sauvoy, près ledict Vaucouleurs, Thiebault d’Aussoys, aultrement le Noble, qui se disoit parent et lignager de ladicte Jehanne la Pucelle lequel avoit esté inquietté et miz en procez par les habitants dud. Sauvoy par devant monsieur le bailly dud. Chaulmont ou son lieutenant afin de paier et contribuer aux fraiz, tailles, impositions et subsides du Roy auquel procez ledit Thiébault avoit obtenu à ses fins et jouy des privilleges de noblesse comme parant de lad. Jeanne la Pucelle sans avoir esté contrainct de paier aucuns droit de talles ou aides, impositions ou subcides, jusques à son trespas. Ce dont les enfans dud. Thiébault apprès son decedz ont jouy dud. privillege de noblesse comme font de présent. Dit aussy led. depposant avoir ouy dire et entendu de lad. Nicolle, veuve dud. Daly et plusieurs autres que sondict mary nommé Daly avoit aucun de ses parens, frère de lad. Jehanne la Pucelle qui s’estant retirée à Orléans ou es environ dont luy fut prévost dud. lieu, et que ses successeurs auroient depuis esté alliez en la maison de ceux de Villebresme près led. Orléans, gens nobles, riches et oppulents et de grande parenté, comme l’on disoit. Dict aussy avoir eu venir led. Du Chemin en ce lieu de Vaucouleur et aud. Dompremy par plusieurs foys visiter les parens de lad. Jehanne la Pucelle lesquelz il tenoit et repputoit ses cousins et parens mesmement Didon et Anne Daly, filles dudict deffunct Claude Daly, demourans ladicte Didon audict Dompremy et ladicte Anne au lieu de Coussez, lez led. Dompremy lesquelles uzent encore de présent des tiltres de noblesse sans paier et estre contribuables à aulcun subcide. Et dit aussy le depposant avoir veu certaines lettres dudict Du Chemin, cachetez des armes de ladicte Pucelle, asçavoir une espée, une couronne dessus et une fleur de lys de chascun costé. Et pour ce pense led. Du Chemin estre parent et lignager de lad. Jehanne la Pucelle. Et si a dit n’avoir eu congnoissance dud. de Tournebu sinon que avoir ouy dire aud. Du Chemin qu’il estoit comme luy parent et lignager de lad. Pucelle. Et plus n’en a dit.

Mathieu Gilles, praticien, demeurant à Roye, aagé de quarante cinq ans ou environ, comme il a dict apprez serment par luy faict aux saincts évangilles de Dieu, de dire vérité et interrogé sur ce que les témoings précédents ont esté ouys et examinés, a dit et depposé que luy qui est né et natif de la cité d’Orléans, de son jeune aage, et par exprès, voyant les grandz honneurs et louanges, que en ce dit lieu d’Orléans, on faisoit à Jehanne la Pucelle pour les causes des proesses et vertus d’elle, ayant entendu elle natifve de Dompremy près Vaucouleurs, luy s’envint demourer et faire sa résidence en ce dit lieu de Dompremy, au quel lieu s’est maryé et a prins femme, natifve du lieu de Bureyen-Vaulx, duquel lieu, comme on disoit, estre le lieu de natifvité des père et mère de Jehanne la Pucelle. Et a congneu depuis ledict temps grande partie des parents dicelle Jehanne la Pucelle, qui iceulx pour raison des privilléges et franchises qui avaient esté donnés à la dicte Pucelle vivoient noblement, usoient du tiltre de noblesse sans estre aucunement subjectz ne contribuables à aucuns subcides, mesme ung nommé Estienne Maurize qui pour raison d’une fille qu’il espouza nommée Annette, laquelle estoit du parenté de ladicte Jehanne la Pucelle, pour ces causes fut anobly et jouy des priviléges de noblesse, exempt de touttes subcides quelconque et en a joui toutte sa vye. Aussy que lui deposant a veu par plusieurs fois venir par le pais desd. Vaucouleur et Dompremy un gentilhomme nommé Lucas Du Chemin, sieur du Féron visiter ses parens de ces dicts lieux de par et ce que tous estoient yssus de lad. Jehanne la Pucelle et d’iceulx estre advouti parent prochain. Luy deposant a eu la cognoissance que led. Du Chemin estoit de la lignée de Villebresme en laquelle lignée il a certainement ouy desclarer, au lieu de sad. nativité, un nommé Jehan, frère d’icelle Jehanne la Pucelle, qui fut prévost d’Orléans, que une fille dud. sieur fut conjoincte par mariage a un nommé de Villebresme, natif de Bloys, prèz Orléans ; aussy avoir cogneu aud. lieu de sa nativité plusieurs personnages yssuz, descenduz et procréez de la liguée d’iceluy Jehan, prevost d’Orléans et d’icelle de Villebresme, gros personnages et apparentez, vivant noblement avec grand honneur. Et dict aussy ledict déposant ou païs dud. Vaucouleur avoir veu es mains d’auccuns personnages des noms desquels n’est recordz luy déclarans, de la lignée de Jehanne la Pucelle, certains tiltres, procédures et sentances par lesquels il luy est apparu qu’ils estoient renvoyés, par aucthorité de justice, comme gens francs et exempts de tout impoz et subcides qu’on leur pourroit imposer et jouir desormais de l’estat de noblesse tant en ligne masculine que foeminine. Et par espécial ung nommé Claude Daly et Didier Daly son frère, enfans de Didon Daly, et d’ung Moricet Thierret, qui se disoient parents de ladicte Jehanne la Pucelle et telz estoient tenuz et repputés audict Dompremy et aux erivirons, à cause de laquelle Jehanne la Pucelle eux tous jouissoient et jouissent encore de présent dud. tiltre et privillege de noblesse, vivant librement sans servitude comme à gens nobles appartient de faire. A encore dict que, estant audict Orléans du temps de sa jeunesse, avoit ouy dire à Mathieu Bonroy, père de la mère dudict déposant, ledict Pierre qui fut prévost d'Orléans et dont il a parlé ci-dessus, avoir tousjours esté réputé audict Orléans estre frère de ladicte Jehanne la Pucelle, et que en faveur de ce, ledict office de prévost luy avoit esté donné par le roy notre sire lors regnant, et les successeurs et yssuz et procréés dudict Jehan, prévost d’Orléans, avoient estez alliés en la maison de Villebresme, de laquelle maison il a congnoissance ledict Du Chemin estre yssu et descendu. Et sy a dit ledict déposant que ledict Du Chemin estant par deça, apprez s’estre informez de ses parents du costez de ladicte Jehanne la Pucelle avoit trouvé Nicole le Noble dicte d’Aussoy, fllle de feu Thiébault le Noble dict d’Aussoy, en son vivant demourant à Sauvoy estre de son lignage et parenté du costé de ladicte Jehanne la Pucelle et que lors ladicte Nicole luy bailla pour le servir un sien fils nommé Claudin et plus n’en a dict.

Jacob Robert, laboureur, demeurant à Burey-en-Vaulx, aagé de soixante et douze ans ou environ comme il a dict, après serment par luy faict aux sainctes évangilles de Dieu de dire vérité, et interrogé sur ce, a dict et déposé qu’il est natif du lieu de Burey-en-Vaulx distant de demy lieue dudict Vaucouleurs, approchant le lieu de Dompremy-sur-Meuze et distant de deux lieues et demye, auquel lieu il a tousjours fait sa résidence et ouy dire à Catherine sa mère défunte, plusieurs fois, que Jehanne la Pucelle, dudict Dompremy, dont a esté et est tant de bruit au pays, lorsque le sieur de Baudricourt, capitaine dudict Vaucouleurs, l’amena vers le roy lors régnant, ladicte Jehanne demeuroit audict Burey en l’hostel du nommé Jehan le Vouthon, père-grand audict déposant ; laquelle Jehanne la Pucelle ainsi menée par ledictde Baudricourt, comme dict est, étoit près d’une nommée Catherine quand ledict Baudricourt fut quérir ladicte Jehanne la Pucelle à l’hostel dudict Vauthon, père de ladicte Catherine, et que ladicte Jehanne la Pucelle fist tant de proesses de guerre qu’elle remit le roy en son royaume et chassa les Anglois ses ennemis hors dudict royaume, et que en recognoissance de ce, ledit roy donna franchise et anoblist toutte la parenté et lignée tant masculine que foeminine de ladite Jehanne. De laquelle lignée se disoit Claude Daly, de Dompremy, et Thiébault le Noble, de Sauvoy, lesquelz led. déposant a, par plusieurs foys veu et leur a ouy dire qu’ils estoient francz et examptz de toutte taille, subcide, à cause du privillege donné à lad. Jehanne la Pucelle leur parente, ne scait à quel degré de ligne masculine ou foeminine. Et il a dict estre recordz avoir ouy dire à sad. mère que lad. Jehanne la Pucelle avoit eu deux ou trois frères, lesquels apprez que lad Jehanne la Pucelle eut faict les proesses et vaillances dessusdictes, ils se retirerent vers Orléans, dont un d’iceulx nommé Jehan fut prevost dud. Orléans ; ne scait si led. Du Chemin est venu et yssu du lignage dud. prevost d’Orléans, combien que il a par cidevant veu au pais de par deçà quelquefois led. Du Chemin se dire estre parent lignager de lad. Jehanne la Pucelle et aussy que sont plus de trente ans que il a veu venir des pellerins à St-Nicol las en Lorraine qui se disoient estre dud. Orléans et parens de lad. Jehanne la Pucelle mais qu’ils furent parens dud. Du Chemin, n’en scaurait parler forz ainsy qu’il a dict cy-dessus. Et plus n’en a dict.
Blaize Barrois, masson, demeurant à Burey-en-Vaulx, aagé de soixante ans ou environ, comme il a dict lequel après serment par luy faict aux sainctes évangilles de Dieu, dedire vérité, interrogé sur ce que les témoings précédens ont esté ouys et interrogés, a dict et déposé qu’il est natif de Burey-en-Vaulx où il a tousjours faict sa résidence jusques à présent et a ouy dire par plusieurs fois àfeu Robert Jacquin, en son vivant demeurant audict Burey, qui se disoit oncle de Jehanne la Pucelle, avoir mené ladicte Pucelle au capitaine de Vaucouleurs, nommé le sieur de Baudricourt, affin de la faire mener et conduire au roy au moyen de ce que ladicte Jehanne disoit que sy le roy la voulloit croire elle chasseroit ses ennemnis fors de son royaume, et que finablement par la grande persuasion dudict Jacquin ledict sieur de Baudricourt auroit envoyé et faict conduire vers le roy ladicte Jehanne et un nommé Jehan de Mets, et, un autre, le Batard de Pleuge, laquelle Jehanne ainsy conduite fist grandes proesses et faits de guerre pour le service dudict roy pour récompense de quoy, comme tousjours lui déposant a ouy dire, fut anoblye et toutte sa postérité et lignée soit du costé paternel ou maternel de ladicte Jehanne la Pucelle, dont ils ont tous-jours jouy comme a entendu et entend ledit déposant.

Mesme un nommé Tiebault le Noble en son vivant, demeurant à Sauvoy, lequel en l’an mil cinq cent vingt-quatre ou vingt-cinq iceluy Le Noble demourant au lieu de Broussey en Bloys sous M. le duc de Bar à cause de la prévosté de Gondrecourt, fut fait assemblée et amats pour prendre et élire gens pour la deffense du pays, au moyen de l’assemblée, estant sur les frontières d’Allemagne des gens assemblées appelés les luthériens ; et estant faisant monstre aud. Gondrecourt le bailly et capitaine desd. de la prévosté de Gondrecourt voyant led. Thiebault le Noble n’ayant équipage comme les autres, s’adressa aud. le Noble luy disant : pour quelles raisons étoit qu’il n’estoit en tel équipage que estoient les autres ? lequel le Noble fist réponse qu’il estoit noble et venu de noble lignée àcause de Jehanne la Pucelle, parquoy n’estoit tenu d’estre en lad. Assemblée avec les roturiers, ce oyant led. bailly laissa led. Thiebault le Noble et ne le contraindit à passer plus oultre avec lesd. roturiers et a dict avoir ouy dire plusieurs fois aud. Jacques que lad. Jehanne la Pucelle avoit laissé de ses frères en France vers Orléans, qui y avoit accumulé de grandz biens, seigneuries et possessions et que les enfants desd. frères de lad. Jehanne la Pucelle, gens de bien et bonne apparence, estre venus en voyage à M. Sainct Nicollas et visité led. Jacques et aultres parens de lad. Pucelle, l’ont appelé cousine et parente ne scait si led. Du Chemin est descendu des parents de lad. Jehanne la Pucelle demourant aud. Orléans et pays voisins, combien qu’il a ja veu par ci-devant led. Du Chemin en pays par deçà soy disant parent de lad. Jehanne la Pucelle appelant Nicolle le Noble dicte d’Aussois, demourant aud. Sauvoy, fille dud. défunt Thiebault le Noble, cousine et parente, la tenant et réputant pour sa parente à cause et du costé et lignée de lad. Jehanne la Pucelle. Et plus n’en a dict.

Médart Rosnyer, marchand, demeurant à Chalainnes, aagé de cinquante-quatre ans ou environ, comme il a dict après serment par luy faict aux saincts évangilles de Dieu de dire la vérité et interrogé sur ce que les tesmoings précédens ont esté ouys et examinés, a dict et déposé que dès sont trente ans ou environ il a par plusieurs fois hanté et fréquenté au lieu et village de Sauvoy, distant de Chalainnes deux lieues et demy ou environ, auquel lieu de Sauvoy estoit demourant et résidant un nommé Thiébault Lassois dict le Noble et duquel il a bonne congnoissance et par plusieurs fois l’a veu plaider et demourer en cause par devant le prevost de Vaucouleur, pendant lequel temps ledict déposant se trouva audict Sauvoy en l’hostel dudict le Noble où estoit Jean Vaulseux demourant lors à Sauvigny-lez-Voixe, lequel se disoit estre parens et cousins issus et venuz de Avelyne qui estoit tante germaine, comme ilz disoient, de feue Jehanne la Pucelle ; et avoit ledict Thiébault, comme il disoit audict le Vaulseux, des lettres du roy comme les siens enfans et tout ceulx qui sont parens et venus de la lignée de Jehanne la Pucelle sont nobles. Faisant ledict Thiébault ostention de certaines lettres de parchemin où y avoit un grand seel pendant, mais pour ce que luy déposant ne vehit et ne leut la teneur desdictes lettres ne sçauroit dire ce qu’estoient lesdictes lettres, dont ledict le Noble se vantoit, disant par luy le Noble audict Vaulseur en tenant lesdictes lettres : « Vous qui estes de la lignée, vous estes bien sot que vous ne poursuiviez pour en avoir comme moy : ce que vous obtiendrez facillement ainsy que j’ay faict. A quoy luy Vaulseur feist responce qu’il ne s’en soucyoit d’autant qu’il n’estoit demourant au Royaulme ny d’obéissance du Roy et sy a dict avoir par cy-devant veu led. Du Chemin au païs par deçà, se repputer et tenir parent de lad. Jehanne la Pucelle, faisant grande feste et caresse à ceux qui soy disoient (tels), les y repputant et tenant pour ses parens, mesme une nommée Nicolle d’Aussois, fille dud. defunct Thiebault d’Assois, dit le Noble, l’appelant sa cousine et de faict advint, un jour qu’il fut par deçà, un des enfants de lad. Nicolle nommé Claudin, disant qu’il estoit son parent et lui feroit du bien. Et plus n’en a dit.
Nicolle d’Assois dicte la Noble, femme de Nicolas Fririot, aagée de cinquante ans ou environ, comme elle dict apréz serment par elle faict aux saints évangilles de Dieu de dire vérité et interrogée sur ce que les tesmoings précédens ont esté ouys et examinés, a dict et déposé estre fille de feu Thiébault d’Assois autrement dict le Noble, en son vivant demourant audict Sauvoy, auquel Thiébault, son père, elle a tousjours ouy tenir, dire et réputer qu’il estoit assez prochain parent de Jehanne la Pucelle, de son costé et ligne. Et au moyen de ce ensemblement tous ses autres parents estoient anoblys et tenus francs et quittes de toutte taille comme personnes nobles. Sçait que led. deffunct son père auroit esté inquiété et poursuivy pour païer taille comme roturier, et dont il auroit esté longtemps en procez ; finablement ayant prouvé estre provenu de la lignée et parenté de lad. Jehanne la Pucelle, auroit obtenu sentance et arrêt à son profict et de mouré quicte franc et exempt des tailles comme noble, le reste du temps qu’il a vescu depuis.

A dict davantage avoir ouy dire audict défunt son père qu’il avoit esté au lieu d’Orléans visiter un de ses parents que ledict Thiébault disoit estre l’un des frères de ladicte Jehanne la Pucelle, tenant grande terre et fust noble ; et lequel avec aultre de ses frères se seroit retiré en France vers Orléans après le partement de Jehanne la Pucelle audict pays de France. Et sy a dict ladicte déposante qu’elle a vu ledict Du Chemin qui a depuis quelque temps jà esté par deça pour sçavoir et congnoistre ses parents et lignagers du costé de ladicte Jehanne la Pucelle, lequel avoit trouvé et congneu par les rapports de plusieurs personnes sur leur généalogie, qu’ils estoient paranis du costé de ladicte Jehanne la Pucelle et, pour congnoissance et amytié de parenté, avoit ledict Du Chemin prins ung des fils de Jadicte Nicolle nommé Claudin pour mettre avec luy, pour luy faire veoir et entendre ce que c’est du monde et comme un gentilhomme se doibt gouverner.

Du treiziesme jour dud. mois et an honorable homme Jean Le Roy, sergent royal au bailliage de Chaumont en Bassigny, demourant à Vaucouleur, aagé de quarante deux ans ou environs, interrogé sur ce que les précédents tesmoings ont esté ouys et examinez, lequel aprez serment par luy faict sur les sainctes Esvangilles de Dieu de dire vérité, a dict et déposé qu’il est natif dud. Vaucouleur où il a tousjours faict sa résidence et que depuis qu’il a esté pourveu dud. office de sergent sont dix-huit ou vingt ans, et au-dessus, au paravant il a par plusieurs fois hanté et fréquenté au village de Sauvoy, prévosté dud. Vaucouleur distant l’ung de l’auttre d’une lieue, tant à faire plusieurs exploicts que aultrement, pourquoy dict avoir bonne soubvenance d’ung nommé Thiebault le Noble, qui demeuroit aud. Sauvoy et avoir beu et mangé avec luy auccunes fois tant aud. Vaucouleur que sud. Sauvoy, et estant eusemble à banquetter luy disoit luy depposant telz motz ? Venez çà, Thiebault le Noble ; estes vous noble pour ce que on vous appelle noble. D’où vous vient ceste noblesse ? Faisoit response led. le Noble aud. déposant que ce n’estoit sans cause si on l’appeloit Noble car comme il disoit la mère de luy estre prochaine parente venue et yssue de la lignée de Jehanne la Pucelle, et que à cause de tous ceulx et celles qui estoient et sont venuz et yssuz du lignage de lad. Jehanne la Pucelle estoient nobles vivant noblement, sans payer aucune taille ou subcide et que peu après les habitans dud. Sauvoy pour estre certiorés de sa noblesse, le voulloient controindre à contribuer esd. tailles et impots royaulx par devant monsieur le bailly dud. Chaulmont ou son lieutenant dès sont vingt quatre ans ou environ comme semble aud. depposant, ou tant auroit esté procédé qu’il avoit obtenu sentence à son proffict contre lesd. habitans dud. Sauvoy, laquelle led. déposant auroit depuis leu et veu contenant environ trois ou quatre peaulx de parchemin escripts, en vertu de laquelle sentence led. Thiebault fut renvoyé absoulz des fins et réclamations desd. de Sauvoy et depuis ledict temps luy déposant a veu led. Thiebault le Noble user et jouir dud. privillege de noblesse jusques au jour de son trespas. Et procédoit led. privillege de noblesse du costé et ligne de sad. mère qui estoit yssue et venue du lignage de lad. Jehanne la Pucelle comme luy déposant auroit ouy dire par plusieurs fois aud. Thiebault le Noble et estoit la commune renommée comme est encore le présent au païs par deçà que tous ceulx et cellez qui sont venuz et yssuz de la lignée et génération de lad. Jehanne la Pucelle ont esté et sont tenuz et réputez nobles, vivant noblement tant du costé paternel que maternel à cause du droict concédé par le Roy nostre sire à lad. Jehanne la Pucelle pour les vertueux faictz par elle faictz au royaulme de France. Sy a dict avoit par aulcune foys veu led. Du Chemin aud. Vaucouleur et païs par deçà venir visiter et s’enquérir qui estoient les parens de lad. Jehanne la Pucelle de la lignée de laquelle il se disoit estre et mesme l'a veu parier plusieurs foys estant par deçà à Nicolle, fille dud. Thiebault le Noble dont a parlé cy-dessus la tenant et reputant sa parente et cousine pour estre yssue et descendue de la lignée de lad. Jehanne la Pucelle. Et quand aud. Le Four-nier a dict n’en avoir eu aucune cognoissance fors avoir ouy dire aud. Du Chemin qu’il estoit venu et yssu comme luy du lignage d’icelle Jehanne la Pucelle et autrement n’en sauroit parler. Et plus n’en a dit.

Et ce mesme jour, pour procéder, en oultre, aux faicts de ladicte enqueste sommes estez requis par ledict Du Chemin nous transporter dudict Vaucouleur audict Domp. remy, distant l’un de l’autre, comme dict est, de trois lieues, ce que luy avons accordé faire. Et estant audict Dompremy en l’hostel et taverne de la veufve feu Gérard Noblesse, dud. lieu, nous a esté par ledict Du Chemin produit en tesmoing, discrette personne maistre François Hurlot, prebtre, demourant audict Dompremy, pour ce adjourné par ledict Le Roy, sergent royal. Lequel après serment par luy faict les mains mises au port comme prebtre, près led. de Ravière, procureur du Roy et de nostre greffier en lad. prévosté, interrogé sur ce que les tesmoings précédens ont esté ouys et examinés, a dict et déposé estre aagé de cinquante ans ou environ, qu’il est natif dudict Vaucouleur, fils de feu Nicolle Hurlot et Jehanne Daly, sa mère ; laquelle Jehanne Daly estoit fille de feu Claude Daly et Nicole sa femme dudict Dompremy, lequel Claude Daly son père-grand, ainsi qu’il a ouy dire et retenu desdictes Nicole, sa mère-grand, et Jehanne Daly, sa mère, estoit des plus prochains parents et lignagers de Jehanne la Pucelle, de laquelle Jehanne a esté et est si grande mémoire. Et que pour estre parent d’icelle Jehanne la Pucelle, son feu père-grand auroit esté anobIy, tenu et réputé noble sans estre contribuable ni taillable à aulcunes tailles, subcides et impositions. Et que depuys le trespas dud. défunct Daly, son père-grand, ladicte Daly se retira de résidence dudict Vaucouleurs au dict Dompremy avec ladicte défuncte Nicolle, sa mère-grand, laquelle il a tousjours vue vivre noblement, sans, comme dict est, estre contribuable à aucune taille, ne pareill ement les autres parens et lignagers, fut en ligne masculine ou foeminine de ladicte Jehanne la Pucelle. Ne sçait our ce que au dict Vaucouleur, ladicte défuncte Jehanne Daly, sa mère, après le trespas dudict Hurlot, son père, fut inquiétée par les habitants dudict Vaucouleur, affin de prier taille, ce qu’elle ne voullut faire, auctorisée de son privillége de noblesse comme lignagère de ladicte Jehanne la Pucelle, dont proccès se seroit meu entre les partyes, pendant lequel proccès elle se seroit remaryée à un nommé Gérard Gobin. Touttefois et nonobstant que ledict Gobin fut roturier, sy tant auroit esté procédé que finablement, par arrest donné par devant Messieurs les généraux à Paris, fut dict que ladicte Jehanne, ensemble ceux qui estoient procédés et qui procéderoient d’icelle jouiroient desdicts privilléges de noblesse, attendu qu’elle estoit descendue de la lignée de ladicte Jehanne la Pucelle, Et fut donné ledict arrest peuvent estre trente-quatre ans ou environ, autrement du temps n’est recordz, et le quel arrest, qui estoit escript en parchemin et scellé de quatre sceaux en placarts de cyre rouge, il a par plusieurs fois leu et tenu, combien qu’il ne sçait où est de présent ledict arrest, au moyen des grandes maladies qu’il a depuis portées. A dict davantage estre recordz d’avoir ouy dir à ladicte défuncte Nicolle, sa mère-grande, qu’il n’y avoient en pays de par deçà plus prochains parents de Jehanne la Pucelle que ledict Daly, son père-grand, et pour ce que deux des frères d’icelle Jehanne la Pucelle, nommés Jehan et Jacquemin, aprez que ladicte Jehanne la Pucelle s’en fut allée en France pour subvenir au roy de son royaume, s’en estoient allez apprez ladite Jehanne et que depuis n’estoient retournez au pays de par deçà et que l’un d’iceux, ne sait lequel, fut prévost d’Orléans et que ledict défunct Daly, son père-grand, ainsi que luy disait ladicte Nicolle, sa mère-grande, avait à diverses fois esté visiter audict Orléans ledict frère de ladicte Jehanne la Pucelle ses parens, qui estoient gens riches et oppulentz, lezquels quelquefois pour singularité envoyaient des vins d’Orléans àson dict père-grand, Claude Daly, jusques au dict lieu de Dompremy, pour congnoissance de parenté et amityé. A dict davantage avoir jà plusieurs fois eu au dict Dompremy ledict Du Chemin soy disant et nommant entre yssu et descendu de l’un des frères de ladicte Jehanne la Pucelle demourant au dict Orléans ou à l’environ ; ce que peut congnoistre led. depposant par les enseignemens et adresses par led. Du Chemin à luy donné, tant déclaration et lettres de généalogie et ligne que par obtention des tiltres et chartes de privilleges accordez à lad. Jehanne la Pucelle. Pense a la vérité qu’il soit, ensemblement un gentilhomme qui accompagnait led. Du Chemin, nommé Jehan Morin, yssuz et procréez de la source et lignée desd. frères de lad. Jehanne la Pucelle ou de l’un d’eux et pour telz les tient et reppute ses parens de la ligne et costé de lad. Jehanne la Pucelle. Et plus n’en a dict sur le tout requis.

Et le lendemain mercredi quinziesme jour dud. mois et an, aud. Domremy, ès logis des susd., comparurent les tesmoings cy après nommés, produits par led. Du Chemin, pour ce adjournéz par led. Le Roy, sergent royal, asçavoir noble femme Didon Daly, veuve de feu Thouvenin Thierret de Massey-sous-Voize et à présent demourant audict Dompremy, aagée de soixante et dix ans ou environ, comme elle a dict. Aprez serment par elle faict aux sainctes Esvangilles de Dieu de dire vérité, interrogée sur ce que les tesmoings précédents ont esté ouys et examinéz, a dict et deposé estre natifve du dict Dompremy, fille de feu Claude Daly et Nicolle sa femme, ses père et mère, avecq lesquelz elle a tousjours fnict sa residence jusqu’à ce qu’elle fust maryée avec ledict Thierret audict Massey, sont cinquante ans ou environ. Et quelque temps apprez alla de vie à trespas ledict défunct Daly, son père, auparavant lequel trespas luy a par plusieurs et diverses fois ladicte deposante ouy reciter son lignage et généalogie, disant estre fils de Jean Daly et Jehanne sa femme, laquelle Jehanne estoit fille de Pierre Daly, frère de Jehanne la Pucelle, lequel Pierre fut prévost de Vaucouleurs qui avoit deux aultres frères, l’un nommé Jean et l’autre Jacques Daly. Et avoit ledict Claude Daly père à ladicte deposante prins ledict nom Daly pour et affin de jouir du privilége et tiltre de noblesse concedés à ladicte Jehanne la Pucelle pour les vertueux faits par elle faictz au royaume de France ; desquels droits et privilleges de noblesse ledict Claude Daly, père d’elle deposante, à cause de lad. Jehanne Daly sa mère, elle deposante et ses autres soeurs comme parens et lignagers, ont tousjours jouy, comme encore font de present, pour estre parens venuz et yssuz de la lignée de lad. Jehanne la Pucelle du costé foeminin. Et sy a dict avoir ouy dire aud. deffunct son père, lad. Jehanne la Pucelle avoir esté conduite et menée vers le sire de Baudricourt, cappitaine de Vaucouleur ou de son ordonnance au Roy nostre sire, du temps que les Anglois occupaient grande partie du royaulme, où icelle faict plusieurs faictz d’armes au moien desquelz lui aurait esté concédé par led. sieur Roy le privillege de noblesse, pour elle, ses freres, parens et lignagers, tant en ligne masculine que foeminine, et que quelque temps après que lad. Jehanne fut ainsy conduicte aud. sieur Roy comme dict est, lesdits Jehan et Jacquin les Daly frères de ladicte Jehanne la Pucelle se retirèrent et s’en allèrent dudict Dompremy audict pays de France, où ils acquirent grands biens et fut ledict Jean Daly prévost d’Orléans, avec lesquels ledict Claude Daly, père d'icelle deposante, s’en alla estant jeune enfant, où il se resida par l’espace de dix ans ; pendant lesquels dix ans décéda la femme dudict Jean Daly prevost, et fut ledict Jean Daly convolant en secondes nopces avec une gentille femme de bonne maison, n’est recorde elle deposante du nom de lad icte maison. Duquel mariage, comme disoit ledict Claude Daly son père, issoyoient et descendoient plusieurs filles et enfants. Lesquels venus en aage auroient esté mariés et allyés en bonnes maisons et dont, à ce que peut entendre elle déposante, par les propos qu’elle a ouys tenir audict deffunct son père, lequel depuis qu’il s’en retourna en pays par delà, du service dudict Jean Daly, prévost d’Orléans, avait plusieurs fois esté le visiter et luy avoit ouy reciter la maison où estoit allé ledict Jehan Daly, prévost, et qu’il avoit une seigneurie nommée Baigneaulx près Orléans où soupvent il se tenoit. Pour ledict Du Chemin et pareillement un autre gentilhomme nommé Jean Morin esleu, descendus et issus dudict Jean Daly, prévost dudict Orléans et frère de ladicte Jehanne la Pucelle et aussy pour les grandes apparences de la généalogie et parenté que ledict Du Chemin a par cy-devant estant venu aud. Dompremy pour visiter la parenté et lignage de lad. Jehanne la Pucelle, a déclaré à lad. depposante, la déclarant et repputant pour sa parente à cause du lignage et parenté de lad. Jehanne la Pucelle et pour tels et aussy led. Jehan Morin et le tient et répute pour son parent àcause du lignage et parenté du costé et ligne de Jehanne la Pucelle.

Noble femme Anne veufve de feu Monget Gautrinot, en son vivant demourant à Coussey-lez-Dompremy, demourant aud. Coussey, aagée de LX ans ou environ comme elle a dict. Après serment faict sur les sainctes Esvangilles de Dieu, de dire vérité, interrogée sur ce que les tesmoings précédents ont esté examinés, a dict et déposé qu’elle est natifve dudict Dompremy, fille de feu noble homme Claude Daly et de Nicolle sa femme, ses père et mère, avec lesquels, et en l’hostel et maison de laquelle est venue et yssue ladicte Jehanne la Pucelle, ladicte déposante a continuellement demouré jusques en l'âge de quinze à seize ans que ledict Daly la maria avec ledict Gautrinot audict lieu de Coussey, où elle a tousjours demouré comme faict encore de présent. Et dit avoir ouy et recité la génération et généalogie de son lignage de son dict père disant estre fils de Jehan Daly et Jehanne Daly sa femme, laquelle Jehanne estoit fille de Pierre Daly, frère de ladicte Jehanne la Pucelle, lequel Pierre fut prevost de Vaucouleurs, qui avoit deux autres frères, l’un nommé Jehan et l’autre Jacques Daly et avoit ledict Jehan Daly, père dudict Claude Daly, prins le surnom Daly à cause de ladicte Jehanne sa femme pour jouir et user des privillèges et tiltres de noblesse concédés à ladicte Jehanne la Pucelle, pour les actes vertueux par elle faits au royaume de France, desquels droits et privillèges de noblesse ledict Claude Daly a tousjours jouy et ses enfants et autres parens, tant en ligne masculine que foeminine, de ladicte Jehanne la Pucelle résidant en ce royaume. Et s’en allèrent lesd. Jehan et Jacques Daly quelques temps après que leur d. soeur Jehanne la Pucelle s’en estoit allée en France, au temps que les Anglois occupoient partye du royaume, Orléans, Blois et ses environs, et que ledict Jehan, fut pourvu de l’estat et office de prévost audict Orléans et marié à une demoiselle qui estoit dudict Orléans, de bonne maison et bonne apparence. Et sy a dict avoir entendu de sondict père que dudict Daly prévost seroient yssus deux filles, de l’une desquelles filles nommée Marye, seroit descendue une autre fille, laquelle avoit esté allyée en la maison de Villebresmes, près Orléans, de laquelle maison ladicte deposante repute et pense estre descendu ledict Du Chemin et pareillement un autre gentilhomme estant avecq luy audict Dompremy, nommé Jehan Morin, pour avoir veu plusieurs fois audict Dompremy ledict Du Chemin, et l’avoir ouy parler de leur généalogie et parenté. Et lequel a tousjours tenu et reputé ladicte déposante sa parente de la ligne et costé de ladicte Jehanne la Pucelle et pareillement a ladicte déposante tenu et reputé ledict Du Chemin et ledict Morin, pour les causes et raisons que dessus, ses parents et lignagers du costé de ladicte Jehanne la Pucelle, comme yssuz du tronc et source dudict Jean Daly, prévost dudict Orléans. Et sy a encore dict que ledict Jehan Daly prévost, en plusieurs et diverses fois, a escrites de ses lettres missives audict deffunct Claude Daly, père de elle deposante, comme à son parent et nepveu du costé de ladicte Jehanne la Pucelle et lesquelles estoient cachetées et armoyées d’une espée couronnée et de chacun costé une fleur de lys, ainsi que sont les armoiries, à elle déposante et ses parents de par deçà. Le sçait ladicte déposante pour avoir veu, leu et tenu lesdictes lettres es mains de sondict père et sy a dict aussy que ledict Jehan Daly en ce dict temps avoit renvoyé, par excellance et congnoissance de parenté et amityé, des vins d’Orléans audict deffunct Claude Daly, père d’elle déposante jusques audict lieu de Dompremy. Et plus n’en a dict, sur le tout enquise et examinée.

Et en satisfaisant en oultre à la teneure desdictes lettres de commission, l’advis de nous, prévost, procureur du Roy et greffier en ladicte prévosté de Vaucouleur est que ayant esgard aux depositions des tesmoings cy dessus, ledict Lucas Du Chemin, sieur du Féron, doibt soubz le bon plaisir du Roy nostre sire et de vous, nos sieurs des Comptes, jouyr des privi lleges de noblesse pour estre descendus de la lignée de ladicte Pucelle.

Ainsy signé Mougeot, de Ravières et de Cléry.

Et plus bas est escript : Collation de la présente copie a esté faicte avec son original au greffe de la chambre des Comptes du Roy nostre sire en vertu de la requeste présentée à la chambre par Robert le Fournier, baron de Tournebu, soy disant descendu de la lignée de la Pucelle d’Orléans, le 12 mars 1551. Signé : Lemaître.

Autre collation faicte sur la copie en papier cy-dessus en la cour des aydes en Normandie, le 3 avril 1620. Signé Perier.

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