Samedi 21 janvier 1792. Sierck, 10 heures du matin.
Je suis revenu de vedette sans avoir vu même un hulan : il n'y a point d'ennemi dans les environs. Me revoici à Sierck, mais comme l'oiseau sur la branche. Le capitaine a reçu hier des nouvelles qui lui marquent que tous nos emplacements vont être changées. Quatre compagnies iront à Rodemacks, trois ici et le reste dans les villages. Où ira la nôtre, c'est ce qu'il m'est impossible de savoir en ce moment. Je viens de lire attentivement le décret sur l'organisation des volontaires. J'y ai vu avec plaisir qui ne serait pas impossible d'avoir des congés en les demandant avec un certificat de sa municipalité, visé par le directoire du district. Nous pourrons nous procurer cela, il me semble. Mais bien des volontaires de ma compagnie qui n'ont pas eu de congé depuis la formation prétendent y aller incessamment : cela me tourmente un peu, car tout le monde ne pourra y aller en même temps.
Me voici donc engagé pour la campagne. Elle finit le 1er décembre. En est réfléchissant, je me suis dit ceci : ou bien la Patrie sera en paix et alors les volontaires seront licenciés, ou bien la patrie sera encore en danger et alors il serait honteux de l'abandonner. Je voudrais que vous lussiez ce décret en entier pour me dire ce que vous en pensez. La nation nous y accorde la plus belle et la plus glorieuse récompense : le titre de citoyen actif à l'âge de 25 ans. Rien n'est plus capable d'élever notre courage que cette récompense là. Le décret porte qu'elle sera accordée à ceux qui sont entrés dans le bataillon à leur formation ; je ne sais si je suis dans ce cas. Je serai bien heureux, bonne mémère, d'obtenir de votre générosité le titre de citoyen actif ; mais combien il serait glorieux de l'obtenir de la patrie à titre de récompense. Voilà une récompense digne des beaux temps d'Athènes et de Rome et qui ne ressemble guère à celle que l'on accordait au temps du gouvernement despotique. Plus il y avait d'argent attaché à une récompense, plus elle était belle et plus on l'admirait. Ah ! Quel temps ! Jamais il ne reviendra quoi que fasse nos ennemis, non jamais ! Nous périrons plutôt !
Je suis revenu de vedette sans avoir vu même un hulan : il n'y a point d'ennemi dans les environs. Me revoici à Sierck, mais comme l'oiseau sur la branche. Le capitaine a reçu hier des nouvelles qui lui marquent que tous nos emplacements vont être changées. Quatre compagnies iront à Rodemacks, trois ici et le reste dans les villages. Où ira la nôtre, c'est ce qu'il m'est impossible de savoir en ce moment. Je viens de lire attentivement le décret sur l'organisation des volontaires. J'y ai vu avec plaisir qui ne serait pas impossible d'avoir des congés en les demandant avec un certificat de sa municipalité, visé par le directoire du district. Nous pourrons nous procurer cela, il me semble. Mais bien des volontaires de ma compagnie qui n'ont pas eu de congé depuis la formation prétendent y aller incessamment : cela me tourmente un peu, car tout le monde ne pourra y aller en même temps.
Portrait de Mme Durival, dite "mémère", mère adoptive de Joseph-Louis-Gabriel NOEL
Me voici donc engagé pour la campagne. Elle finit le 1er décembre. En est réfléchissant, je me suis dit ceci : ou bien la Patrie sera en paix et alors les volontaires seront licenciés, ou bien la patrie sera encore en danger et alors il serait honteux de l'abandonner. Je voudrais que vous lussiez ce décret en entier pour me dire ce que vous en pensez. La nation nous y accorde la plus belle et la plus glorieuse récompense : le titre de citoyen actif à l'âge de 25 ans. Rien n'est plus capable d'élever notre courage que cette récompense là. Le décret porte qu'elle sera accordée à ceux qui sont entrés dans le bataillon à leur formation ; je ne sais si je suis dans ce cas. Je serai bien heureux, bonne mémère, d'obtenir de votre générosité le titre de citoyen actif ; mais combien il serait glorieux de l'obtenir de la patrie à titre de récompense. Voilà une récompense digne des beaux temps d'Athènes et de Rome et qui ne ressemble guère à celle que l'on accordait au temps du gouvernement despotique. Plus il y avait d'argent attaché à une récompense, plus elle était belle et plus on l'admirait. Ah ! Quel temps ! Jamais il ne reviendra quoi que fasse nos ennemis, non jamais ! Nous périrons plutôt !
Source : Au temps des volontaires - 1792, lettres d'un volontaire de 1792 (Joseph-Louis-Gabriel NOEL), par Gabriel NOEL, Plon-Nourrit, 1912
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