SAIN (Jean-Baptiste Camille), né à Vienne (Isère), le 9 pluviose an XI de la République (30 janvier 1803), fils aîné de Jean-Marie, docteur en chirurgie et de Marguerite Cézarine ALMERAS-LATOUR.
Autoportrait de Camille Sain
Après avoir fait une partie de ses études au collège de Vienne, il entre par goût à l’école de dessin dont Etienne REY était alors le directeur (1), et se fait remarquer par ses bonnes dispositions artistiques.
A sa sortie de l’école, Camille SAIN est embauché en qualité de dessinateur par les principales fabriques de soierie de Lyon et de Saint-Etienne. Il occupe ensuite un poste identique dans la grande fabrique de MM. PERRIER, à Vizille.
Ses dessins, que distingue une originalité de bon goût, sont presque toujours reçus et classés avec des notes élogieuses. On peut dire que l’artiste s’associe, en quelque sorte, à la réputation des maisons où il travaille, en y contribuant par ses oeuvres d’art.
En 1830, il est nommé directeur de l’école municipale de dessin de Vienne. La vie aurait pu être heureuse pour lui, car l’avenir lui sourit. Mais, entraîné par son caractère d’artiste, il croit pouvoir abandonner une carrière où il était appelé à réussir pour se jeter dans les hasards, les tribulations et les misères de la carrière théâtrale (2).
Dessin de la maison des Alméras-Latour à Chuzelles (par Camille Sain)
Malheureusement pour lui, ses débuts sont heureux ; et c’est peut-être ce qui l’enhardit à continuer sans songer aux déboires possibles.
Après avoir vendu, peu à peu, tout ce qu’il possède, il est obligé de reprendre ses crayons et d'aller de ville en ville faire des portraits qui lui attirent un certain renom. A une exposition des beaux-arts de Boulogne-sur-Mer, il obtient même une médaille d’or.
Revenu au pays natal, en 1850, il y exerce « la peinture en tout genre (3), la décoration intérieure et extérieure, l’attribut pour enseignes » et même, en 1859, la photographie.
En 1851, fort de son expérience d’homme de théâtre, il participe à la restauration de notre salle de spectacle (4) et donne une nouvelle preuve de son talent dans l’ornementation des nombreux décors scéniques. La richesse s’y trouve alliée à la simplicité et à la bonne entente des détails. « Son rideau surtout est remarquable par la vigueur des tons et par le choix du tableau qui reproduit l’un des sites viennois les plus splendides : l’antique plaine de l’Aiguille. Le ruban argenté de notre beau fleuve, la limite vers la droite, et les hautes cimes du mont Pilat la terminent dans un lointain vaporeux. Sur le premier plan se présente le curieux monument romain unique dans son espèce ... », et, pour terminer « les armes de la ville de Vienne couronnent l’encadrement du rideau ... " » (5).
Blason de la famille Sain
Tous les amateurs d’art ont pu juger de son talent et de sa manière facile dans ses charmantes compositions où la coquetterie de l’arrangement le dispute à la vérité de l’imitation, à la vivacité, à la fraîcheur des couleurs et à l’harmonie de l’ensemble.
Le musée des Beaux-Arts de Vienne possède, dans ses réserves, de nombreuses oeuvres sur papier de cet artiste : crayons, gouaches et aquarelles représentent des paysages viennois et des portraits (6).
Mais c’est surtout ses oeuvres imprimées qui l’ont rendu populaire : notamment son « album viennois » composé de douze lithographies signées C.S. représentant les monuments et les points de vues les plus remarquables de Vienne. Album édité en 1858 par son ami Joseph TIMON (7).
Aquarelle du château de Veynes (Genas), propriété du baron Louis Alméras (par Camille Sain)
Mais son esprit finement et spirituellement observateur le porte surtout à la caricature et à la charge ; et nul doute que, dans ce genre où il excelle, Camille Sain aurait pu se faire un nom, même parmi les artistes les plus renommés de la capitale.
Cet homme, qui dans sa jeunesse est recherché par la plus haute société viennoise, est mort à l’hospice de Vienne où il venait d’être admis (8), le 19 janvier 1869, dans un état voisin de la pauvreté, malgré les quelques petits secours que ne lui refusaient jamais ses anciens amis et le produit d’une rente viagère que lui avaient assurée les membres de sa familles (9).
(1) E. Rey succéda à Schneyder en 1815 jusqu'à 1822.
(2) En 1840, il était directeur du théâtre de Perpignan.
(3) Portraits, dessins, lavis, cartes de visite pour albums, stores, écrans, vitreux transparents ; il se charge même de la restauration des vieux tableaux. "Moniteur Viennois", n° 1, 2 janvier 1852.
(4) Camille Sain, l’auteur du projet, et Joseph Lacamp, l’architecte viennois, avaient fait deux parts du travail à exécuter : l’une, relative à la peinture, à l’ornementation et à tout ce qui se rattache à la profession de tapissier, était placée sous la direction de Camille Sain ; l’autre, qui embrasse tous les gros travaux de construction l’était sous celle de Joseph Lacamp.
(5) la description de l'ornementation du rideau de scène est de Victor Teste, conservateur du Musée et bibliothécaire de la ville de Vienne. "Moniteur Viennois", n° 31, vendredi 1er août 1851.
(6) Cinq de celles-ci avaient été placées, il y a quelques années, dans les bureaux et salons privés de la sous-préfecture, et ont été réintégrées au Musée des Beaux-Arts en janvier 1980.
(7) Après le succès de cet album, Camille Sain se proposait de lui donner une suite par une nouvelle série de seize lithographies encore plus attrayantes par la variété et le choix des points de vue, mais ce projet, faute de souscripteurs, n’eut pas de suite, et c’est bien dommage.
(8) Des suites d’une chute grave.
(9) Entre autres son cousin Louis-Michel Alméras-Latour, magistrat.
Source : Une famille Viennoise au XVIIème et XIXème siècles : les Alméras et leurs alliances, par Roger DUFROID.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire